LA FIADREP

ETAT de la PHYTOTHÉRAPIE au MEXIQUE en 1994

par le Docteur Paul Hersch.
Institut National d'Anthropologie et d'Histoire (INAH Mexico).
Membre correspondant de la S.F.P.A.

L'utilisation des plantes dans le traitement des maladies, c'est-à-dire, la Phytothérapie, est un passage obligé dans toutes les sociétés humaines. Cependant, le mode d'utilisation de cette phytothérapie varie en fonction des caractéristiques particulières biologiques, culturelles et socio-économiques de chaque société.
Il faut ainsi tenir compte de certaines différences d'ordre général existant entre la situation de santé et de maladie en France et au Mexique, pour cela, on peut se reporter aux chiffres du tableau suivant :

MEXIQUEFRANCE
Nombre d'habitants, prévision 95, en millions97,96757,138
Nombre d'habitants par km2, prévison 9550104
Espérance de vie des personnes nées entre 1990/9570,476,8
Nombre moyen d'enfants par femme en 19903,31,8
Décès avant l'age de 5 ans pour 1000 naissances en 1990499
Consommation d'alcool par adulte, en litres, données de 1992  2,5916,23
Part du revenu national consacré à la santé, en %2,36,6
Nombre d'habitants par médecin, en 19841.242320
Nombre d'Ecoles de Médecine, 19855737

Ces différences importantes s'expriment aussi dans l'utilisation des plantes médicinales. Ainsi, bien qu'il existe dans le monde entier un modèle médical superposable qui prévaut dans les milieux de santé officiels, la médecine appelée classique par certains, il existe aussi une médecine qualifiée de moderne par d'autres dans laquelle la thérapeutique à base de médicaments synthétiques et de principes actifs ou pharmacothérapie de synthèse occupe un espace central. Par ailleurs,la Phytothérapie qui se pratique en Europe actuellement diffère en général de celle qui se pratique en Amérique latine.

Parmi les différences les plus importantes dans ce sens, les plus frappantes sont celles concernant l'origine des plantes utilisées ainsi que le mobile de leur usage.. Les plantes médicinales consommées en Europe, proviennent en général de la culture et sont produites d'une manière systématisée, alors que la majeure partie des plantes médicinales de l'Amérique latine, de l'Afrique et aussi d'une bonne partie de l'Asie proviennent de la collecte, c'est-à-dire que ce sont des plantes sauvages.

Dans ces mêmes régions du monde, la majeure partie des utilisateurs de plantes médicinales recourent à elles parce qu'ils n'ont pas accès à la médecine moderne dans le cadre de la médecine traditionnelle et de la médecine domestique. Les plantes font partie d'une stratégie populaire de survivance à cause de leur plus grande accessibilité alors qu'en Europe, aux Etats Unis et dans d'autres zones de la planète industriellement plus développées , on utilise aujourd'hui la flore médicinale comme une alternative de plus, par une partie de la population qui, en général, et malgré la crise actuelle de la société de consommation, a résolu l'accès à la médecine moderne, et a un niveau de vie nettement supérieur à celui existant dans les pays les moins développés.

Au-delà des contrastes importants existant dans l'utilisation des plantes médicinales entre une région du monde et une autre, il existe, à l'intérieur de chaque pays, une large gamme d'indications de la flore médicinale retenues de l'usage.. Ainsi, les plantes médicinales s'utilisent au Mexique actuellement en divers endroits et selon des modalités différentes.. La tradition et la modernité, la spéculation commerciale et l'activité académique, la nécessité et la mode se trouvent mélangées avec la plante médicinale.

C'est pour cela qu'aujourd'hui au Mexique, la plante est utilisée aussi bien par le guérisseur que par l'industriel, par le malade et le professeur de pharmacie que par la maîtresse de maison ou le médecin ! Et chacun conçoit son utilisation d'une façon différente.

Pour un médecin, pour une mère de famille, pour un thérapeute traditionnel, pour un ouvrier, pour un paysan, pour celui qui a une officine ou pour un pharmacien, le même objet matériel suscite une signification différente. Entre autres, la flore médicinale est aujourd'hui simultanément un retour aux sources au moment de chercher un soulagement face à la maladie, un symbole de la mode mercantile d'un retour à la nature, ou une source de principes actifs pour les entreprises pharmaceutiques à la recherche de nouveaux produits commerciaux.

La diversité de la flore médicinale utilisée en France est considérable grâce aux facilités existantes pour importer les espèces du monde entier. D'un autre côté, la diversité topographique et climatique du Mexique se traduit par une flore très variée, calculée en approximativement 22.000 espèces différentes, quantité considérable, équivalente à celle de tout le territoire qu'occupait antérieurement l'Union Soviétique, et probablement supérieure à la diversité existante dans les territoires comprenant les Etats-Unis, le Canada et incluant l'Alaska. Cette variabilité fait qu'il existe au Mexique des ensembles régionaux de plantes médicinales pour les maladies les plus fréquentes.

A propos de cela, il y a des espèces médicinales largement utilisées en France, comme le célèbrissime Ribes nigrum (Cassis), l'Althea officinalis (Guimauve), l'Agrimonia eupatoria (Aigremoine) ou même la racine de la plante africaine appelée Harpagophytum procumbens, inexistante au Mexique, bien qu'il y ait d'autres espèces médicinales très utilisées dans ce pays et que l'on ne retrouve pas en France, ainsi : le Gnaphalium semianmplexicaule ou "gordolobo" pour la toux, l'Amphipterygium astringens ou "cuachalalate" pour les gastrites et les plaies externes, la Calea zacatechichi ou "zacatechichi" pour la mauvaise digestion ou la Ternstroemia pringley ou tilleul de Mexico pour l'anxiété.

Cependant, les éléments communs sont aussi très importants: une part de l'efficacité thérapeutique des plantes médicinales dépend étroitement des cultures et des frontières politiques, des classes sociales et des systèmes économiques, et de la nécessité même des groupes humains à s'organiser quand ils découvrent une alternative de soins médicaux qui les satisfont même si elle n'est pas suffisamment reconnue par les instances officielles universitaires et de santé.

Le Mexique compte actuellement une population d'environ 90 millions d'habitants, pour une superficie territoriale qui équivaut approximativement à 3 fois 1/2 celle de la France. Si on se souvient du tableau précédent, nous comprendrons que les systèmes d'assistance médicale existant dans les deux pays diffèrent par plusieurs aspects: entre autres, on relève une moindre couverture et des prestations différentes dans la sécurité sociale au Mexique.

Par exemple, il n'existe pas de remboursement pour les consultations avec un médecin particulier (on ne peut pas choisir son médecin traitant), de même il n'y a pas de remboursement pour les médicaments (que ce soient des plantes ou des médicaments de synthèse) ou les études cliniques qui sortiraient du cadre de la consultation institutionnelle.

D'un autre côté, en dehors de quelques récents efforts, l'assistance médicale étatique se trouve "atomisée" en diverses institutions de capacités inégales avec duplication des tâches, et donc insuffisante coordination, bien que le recours à ces institutions ait diminué depuis la crise économique du pays. Cette crise qui affecte toute l'Amérique latine depuis le début des années 80.

Une autre différence capitale, la présence au Mexique et dans toute l'Amérique latine de deux systèmes de soins médicaux dont la présence est moindre en France. La médecine dite traditionnelle ou "folk" et la médecine domestique qui s'exerce dans le cadre familial, avec la femme comme thérapeute de base.

Ces deux systèmes de soins médicaux trouvent dans les plantes médicinales , une de leurs principales ressources thérapeutiques.
C'est pour cela que le profil de la phytothérapie qui se pratique solidement au Mexique diffère de celui pratiqué en France à l'heure actuelle.

Nous parlons d'une Phytothérapie fondamentalement populaire, dont les agents et acteurs sont des thérapeutes non académiques, ni institutionnels. La phytothérapie clinique n'est pas d'un usage courant au Mexique bien que quelques pas aient été accomplis pour s'approcher de la meilleure façon de mettre au point une combinaison qui pourrait être extrêmement profitable, ceci entre la riche expérience appliquée et conceptuelle et le considérable réservoir de la flore médicinale existant au Mexique, ainsi qu'entre le très large travail clinique sur les plantes médicinales, synthétique et intégré à un abord intégral du patient, tel que le propose l'enseignement de la S.F.P.A. aujourd'hui et à travers les patients organisés dans l'intéressante expérience de PHYTO 2000, une de ses meilleures cartes.

Les STATUTS de la S.F.P.A.   Les STATUTS de PHYTO 2000


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